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J’ai fait serment d’allégeance à GDO. Même dans ses moments de profonds doutes je me dois de le suivre. Vous ne voyez pas de quoi je veux parler ? Du nouveau Lana Del Rey voyons !

Non content d’avoir décrédibilisé notre affaire avec une chronique, j’ai souhaité en rajouter une couche. Et vous savez pourquoi ? Mais parce que Ultraviolence est le disque que j’écoute le plus depuis qu’il est sorti. Rarement un album m’aura autant obsédé, et croyez-le ou non, j’en suis le premier surpris !

Quand "Born to die" est arrivé j’ai vomi dessus parce que j’avais espéré autre chose. La déception fût grande avec cette tentative de placement pourri, pseudo tout, ptit truc hip hop par là etc...Tout sonnait falsifié, gâché alors que la matière était parfaite...et ma haine en fût exacerbée. A mon détriment. J’ai fini par me convaincre que les erreurs de Born To Die étaient des erreurs de producteurs. C’était bien le cas. Je revenais tout de même l’écouter par ci par là, regrettait ce petit passage, imaginant voire fantasmant un album qui aurait pu être à la place de celui qui fût.

Puis elle annonça vouloir arrêter la musique. J’y voyais un signe : elle avait été déçue, elle voulait proposer autre chose ! La suite me donnait raison, déjà avec "Paradise".

Puis arriva "Ultraviolence", l’album qui aurait pu être son premier, celui que son label voulut lui renvoyer à la gueule tant il semblait mauvais en terme de placement pub. Nouveau producteur, nouveau type aux manettes (et qui donc, Dan Auerbach quand même !!!). Tous les ingrédients réunis, manquait juste les chansons. Allait-elle nous pondre à nouveau des refrains aussi veloutés ? OUI ! et 14 fois ! Je fus pris dans un tumulte émotionnel alors que je voulais la haïr. Mais ses feulements de chatte prises par d’harassantes chaleurs (dixit ma femme qui déteste sa voix) ont fini par prendre le pouvoir. Ma tendre Leeloo a raison, on dirait une chatte qui se frotte sur un réverbère en nous suppliant. Mon dieu que nous sommes bassement libidinaux, et mon dieu qu’elle l’a bien compris, avec ce qu’il faut de classe et de charme pour rendre l’affaire délicate.

Alors oui je sais, je perds dix points de crédit à la chroniquer, mais j’m’en fous j’en ai d’avance, et au pire j’irais en stage de redressement hein ! Pour "West coast" je veux bien faire ça. Dieu sait que j’attendais de la descendre, comme je le fais parfois trop systématiquement avec ce qui porte l’infâmante étoile jaune "mainstream". Je me fais à mon insu sergent de la police des goûts mais il fallut me rendre à l’évidence : je crois que West coast est le morceau que j’ai le plus écouté d’affilée. Impossible de m’en défaire. C’est bourré de phéromones voire trop, c’est le rêve américain. Je suis dans une cadillac, le vent chaud caresse mes tempes et fait griller ma cigarette un peu trop vite, je vois la danse des flammes tandis que Las Vegas s’allume. Une odeur de parfum haut de gamme, un peu trop pour mon pedigree prolo, m’envahit les nasaux habitués à l’humus et au fer forgé. Mais si sur son précédent je me sentais totalement exclu, attendant devant la porte d’entrée gardée par deux videurs, avec ce nouvel album les effluves sont trop fortes, et soit les armoires à glace me laissent passer soit je les déboîte. Je sais maintenant ce qu’est l’insupportable chant des sirènes, celui qui fait de "Brooklyn baby" un titre aussi beau et apaisant que violent dans les émois qu’il provoque. L’invitation de "cruel world" est une ode au saut dans le vide. Et le refrain de "Ultraviolence" ! Depuis quand n’ai-je pas été enveloppé à ce point ? C’est le luxe, avec ce qu’il faut d’accessibilité pour mélanger l’odeur des parfums Givenchy avec celle de travers de porcs à la texane. Ce n’est plus le rêve, mais le magnifique mensonge américain. Celui qui fait que leur variété passera toujours pour de la haute couture à côté de la nôtre.

"Shades of cool" avec sa ligne mélodique si simple est encre une preuve. Avant tout vient l’organe, cette voix qui vibre et fait vibrer des pieds à la tête avec tout ce qu’il y a entre. Un refrain cotonneux, au dessus d’une carte postale de New York sans aucune pollution avec décors en carton pâte. Bordel j’ai forcément repensé à Hope Sandoval, mais aussi aux ambiances étranges d’un Tueurs-nés, notamment ce morceau obsédant : History repeats itself. Mélange de folie et d’esthétique, rêve et réalité croisés comme bien sûr dans l’inévitable Lynch qu’on verra en toile de fond (mais vraiment de fond hein, juste pour l’image féminine qu’il aime développer).

Vous l’aurez compris, ce disque est un disque de fantasmes, d’années folles, d’interminables voitures et jambes suivies de violentes robes, de boucles blondes (fausses bien sûr) et regards azur dissimulant un alibi carnassier. C’est la femme d’Hitchcock, fatale dans tous les sens, la prédatrice. Celle qui foutra le bordel dans vos ménages et vos méninges.

Au delà de toutes ces considérations de gamin de campagne ayant imaginé un idéal américain aussi faux qu’un sabre laser, il y a aussi autre chose dans ce disque : Lana Del Rey a bien repris le pouvoir et prouvé qu’elle en avait à raconter, que la forme était primordiale et que par cette même occasion on pouvait se permettre beaucoup de libertés. Et dans certains textes elle en use bien plus que certains groupes du sacro saint underground qui ne sont pour la plupart qu’une bande de putes n’ayant simplement toujours par réussi à ouvrir leur propre maison close.

Je m’en vais avec mon disque en voiture, m’imaginer au fil de ce qui sera probablement ma centième écoute du disque, que les routes de campagne que je sillonne sont en fait celles des bords de mer floridiens. Mon kangoo deviendra une eldorado, la route s’élargira et les lignes deviendront jaunes. Peut être Lana fera t elle du stop on the way to the top hahaha !

Aucune réalité ne vaut un rêve ou un fantasme. Ou le contraire. Je sais pas, c’est peut être ça l’ultraviolence.