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« How many sad songs does it take to move you ? »… Witold Bolik nous offre ici un vagabondage musical où l’apesanteur de la démarche ne le dispute qu’à la pureté mélodique. Il faut avoir écrit beaucoup de chansons, avoir vécu sa musique avec une intensité sans réserve, avoir perdu tout ses biens matériels à cause d’un incendie pour pouvoir, à un moment, s’ouvrir sans retenue à la beauté de chansons simples comme cette collection fuligine.

Je ne suis certes pas objectif car, depuis Bolik - le groupe – et ses diverses aventures en premier de cordée, le sens savant des arrangements, la chaleur et l’émotion qui se dégagent de la voix de ce camarade ont su me toucher sincèrement. Ce garçon dispose d’un sens de la culture musical et d’une forme d’instinct harmonique qui, augmentés d’une forme aïgue de modestie et d’activisme underground, m’évoque irrésistiblement une sorte de Robert Wyatt (quelques inches et pounds de moins tout de même). Tant pis pour le sens de la mesure ! Car oui, François Doreau a un goût immodéré du bonheur musical qu’aucune contrainte du monde réel ne peut ramener à terre.

« Late sad song » est une ode aux Beach Boys dont les harmonies vocales exhalent une chaleur indélébile. « Borboleta » convoque l’âme de Giberto Gil pour la déposer entre le feu de la cheminée et le sapin de Noël. « Vous » recréé le glamour minimaliste des premiers Katerine (« Mon cœur balance », « un homme, un vrai »). Les voix à l’unisson d’« Yeux » sont enregistrées sur un beau vieux micro à ruban Toshiba et de cette chanson d’amour émane une mélancolie douce et pregnante à la fois… on n’ose en sortir de peur que l’histoire se finisse mal. Ce disque est ainsi, il est court, mais on le passe, le repasse car il nous offre des moments hors du temps et l’on ne veut plus le quitter car dehors la brutalité du monde nous épargnera encore moins maintenant que l’on a fendu avec lui l’armure du quotidien.