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De rien il reste presque tout.

Gratuit est son nom mais pas l’acte de création.

Sous ce nouveau nom, l’ex Belone Quartet, Antoine Bellanger se plonge dans une époque épique de la musique d’ici, une époque qui a retrouvé un écho neuf dans une forêt qui a un peut oublié d’être verdoyante, se voyant plus comme un ersatz crédible d’une époque post punk que véritable dignitaire d’un ordre nouveau, d’une possibilité faussement joyeuse de se regrouper. Avec « Delivrance » Gratuit ne s’est pas constitué une forêt, il a travaillé avec elle, avec ses ombres, ses clairières, ses odeurs, imprégnant chacun de ses pas d’une humus qui ressource. Les thèmes sont simples, cela pourrait presque se résumer par un animal on est mal. « Seul » qui ouvre l’album suggère l’avancée pénible d’un animal, genre d’Orc qui chercherait un lieu loin de tout pour une délivrance. Avec « La Promesse » nous sommes en terrain conquis, une basse vrombissante vient perturber une boucle électronique rappelant une époque, celle de la fin des 80’s, les paroles comme un écho à une certaine façon de vire la musique, comme un réquisitoire pour ne pas oublier que les couleurs donnent le ton. Le « Feu » mettra définitivement Gratuit en haut de la liste de ce revival « Taxi Girliste », boucle tribale, attitude froide, phrases coupées à la serpe, envie de cogner son coude droit dans son genou gauche et inversement. Si tout jusque là paraissait inoffensif, l’arrivée de Julia Lanoë (Mansfield Tya / Sexy Sushi) donnera un côté presque malfaisant sur « Territoire » comme si Indochine avait abandonné la bd pour aller chercher un garçon dans un épisode de Walking Dead. Petit conte pour enfant pervers, « Territoire » donnera du fil à retordre aux pisses froid qui donnent au temps le droit de passer mais pas de repasser. Le vers alors dans le fruit Gratuit peut nous offrir des chansons de plus en plus écritent sur la peau (L’Odeur de la Chair), comme des stigmates à une forêt de plus en plus hostile, prétexte à des paraboles effrayantes qui n’effrayeront pas Françoiz Breut (Mes Lumières Mes Veines). Elle traversera ce morceau aux angles très droits comme un doux félin, courbant les lignes. Il sera alors tant de « Partir » morceau ambigu qui laisse la part belle à une brume épaisse. « Tout Casser » porte bien son nom, car dans la série des possibles tubes qui émergent parfois des musiques souterraines, « Tout Casser » a le rythme, le refrain, le son qu’il faut pour donner envie de passer un bon moment, sauf bien évidemment si vous prenez les paroles presque nihiliste comme une vérité indéfectible, là il ne servira à rien de repasser par la plage 8, le trépas vous attend. Le rythme martial de « Le Silence Des Chiens » s’offrira alors aux téméraires, aux cascadeurs, aux ambitieux. Les chiens n’aboient pas mais vous vous en plaindrez, tant le morceau oppresse par son jeu entre un chant clair et cette musique qui tape pour mieux nous enfoncer la tête sous la terre. Alors Gratuit pourra brouiller les pistes, enlever toutes les traces de son passage, via un feu de forêt gigantesque « L’Omega », laissant une trace sonore de son méfait, comme si le synthétique devait redonner vie à l’organique. Si l’on fête une certaine idée de la musique française depuis le succès d’un Lescop sorti de l’Asyl, il serait néfaste voir criminel de passer sous silence l’acte fort de Antoine Bellanger, qui en dix pièces échafaude un disque passerelle entre la froideur d’un son presque hybride, la chaleur humide de la forêt et des textes qui savent faire monter la température quand dans les clairières le soleil ne perce plus. Payez vous un disque Gratuit.




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